L'abbé Pierre est désormais visé par neuf nouvelles accusations de violences sexuelles, selon un rapport du cabinet spécialisé Egaé publié lundi 13 janvier. Ces nouvelles accusations, dont un viol sur mineur et des faits concernant des membres de sa famille, portent à 33 le nombre d’accusations visant le prêtre, jusqu'ici considéré comme une figure intouchable en France pour son action contre la pauvreté et la précarité.
« Les faits décrits se sont déroulés des années 1960 aux années 2000, la plupart du temps en France et parfois à l'étranger », peut-on lire dans le rapport d’Egaé, qui porte à 33 le nombre de témoignages visant le prêtre décédé en 2007.
Une membre de la famille de l'abbé Pierre a indiqué à Egaé avoir subi de sa part des « contacts sexuels sur ses seins et sa bouche à la fin des années 1990 ». Un autre témoignage fait état d'un « acte sexuel avec pénétration sur un garçon mineur ».
Les personnes qui témoignent vont de la « salariée d'un hôtel dans lequel séjournait » l'abbé Pierre, aux « soignantes travaillant dans des hôpitaux » où il était hospitalisé, en passant par une volontaire pour un camp de jeunes ou une mission humanitaire, ou encore par une membre de la famille et une hôtesse de l'air. En plus de ces neuf témoignages, le cabinet Egaé dit avoir « eu connaissance de l'existence d'au moins une autre victime parmi les membres de la famille de l'abbé Pierre », mais « cette personne n'a pas pu être entendue ».
Il s'agit du troisième rapport du cabinet mandaté par Emmaüs International, Emmaüs France et la Fondation Abbé Pierre pour faire la lumière sur les agissements de l'abbé Pierre, de son vrai nom Henri Grouès.
« D’autres témoignages » ont été recueillis
En juillet 2023, la première salve de révélations basées sur sept témoignages avait provoqué une onde de choc tant l'abbé Pierre, défenseur inlassable des mal-logés et des plus démunis, a longtemps fait figure d'icône. En septembre, un second rapport contenant 17 nouveaux témoignages avait conduit la Fondation Abbé Pierre à annoncer sa décision de changer de nom et Emmaüs à fermer définitivement le lieu de mémoire dédié au prêtre situé à Esteville, en Normandie.
Les derniers témoignages « ne permettent absolument pas de dresser un état des lieux exhaustif des comportements de l'abbé Pierre », insiste le cabinet Egaé dans son rapport. Le cabinet fait état « d'autres témoignages, parfois anonymes ou incomplets ».
En plus de la communication d'Emmaüs international, l'entité réfléchit à la réparation financière, une question « difficile » qui sera « soumise à l'assemblée générale du mouvement », a précisé le délégué général d'Emmaus France. « Le scénario qui semble se dessiner serait de se raccrocher au dispositif de la commission reconnaissance et réparation », mise en place pour les victimes de violences sexuelles commises par des membres d'institutions religieuses.
L'Église de France a réagi peu après l’annonce des nouvelles accusations, affirmant que l'« accumulation des faits » concernant l'abbé Pierre « horrifie ». « L'accumulation des faits désormais connus perpétrés par ce prêtre, qui fut tant admiré, horrifie », affirme dans un communiqué la Conférence des évêques de France (CEF).
La CEF « pense avec une peine immense » à toutes les victimes et elle « encourage toute personne agressée » à « se rapprocher, si elle le souhaite, de l'un des dispositifs d'écoute ou d'accompagnement de l'Église » ou « du dispositif mis en place par Emmaüs ».
« Réaliser qu'il a utilisé son aura médiatique et l'œuvre sociale qu'il avait édifiée (...) pour abuser sexuellement de femmes, d'enfants, et de personnes en situation de précarité, est effroyable. À tous, la Conférence des évêques exprime sa proximité », affirme l'Église dans son communiqué.
rfi