Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) a réclamé lundi des mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu et des dirigeants du Hamas pour des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité présumés commis dans la bande de Gaza et en Israël. Une demande qui représente une équivalence inacceptable pour les Israéliens.

« Quel toupet », s’exclame le Premier ministre israélien pour qui la demande de mandat d’arrêt de la CPI illustre ce qu’il qualifie de « nouvel antisémitisme ». « Ce sont tous les Israéliens qui sont visés par cette décision », souligne encore Benyamin Netanyahu. Cent-six députés sur les 120 que compte la Knesset, le Parlement israélien, ont signé une lettre rejetant la comparaison faite par le procureur Karim Khan qui met sur le même plan Netanyahu et son ministre de la Défense avec les dirigeants du Hamas, relate notre correspondant à JérusalemMichel Paul.

Plus de voyages en Europe

Des réactions très fortes des médias. Les commentateurs parlent de « l’hypocrisie de la Haye ». La demande du procureur est qualifiée de « honteuse ». « Israël est désormais une colonie de pestiférés », estime un chroniqueur judiciaire. Un éditorialiste parle de « but marqué contre son propre camp par Israël ». « Avoir raison n’est pas suffisant. » « Israël mange maintenant la bouillie qu’il a longuement mijotée. » Toutes les images sont là pour illustrer la situation sans précédent dans laquelle Israël se trouve.

C’est la première fois que des dirigeants d’un pays démocratique pourraient faire l’objet de mandats d’arrêts de la CPI, indiquent les experts. Une cellule d’urgence a été mise en place au ministère des Affaires étrangères à Jérusalem pour déterminer la marche à suivre. Dans un premier temps, c’est la voie diplomatique qui est privilégiée. Mais, par précaution, Benyamin Netanyahu et Yoav Gallant vont dès à présent éviter les voyages en Europe.

« Des effets sismiques dans la vie politique israélienne »

Cette demande du procureur affaiblit Benyamin Netanyahu, selon maître William Bourdon, avocat français spécialiste du droit international. « Cette décision va avoir des effets sismiques dans la vie politique israélienne, affirme-t-il à Marine de La Moissonnière du service international de RFI. Est-ce qu’elle va renforcer le camp des progressistes démocrates qui ne cessent de dire halte au feu ? La politique du Netanyahu est totalement suicidaire. Et puis ces mandats d'arrêt vont aussi avoir un impact aux États-Unis. Au regard de la prochaine élection de Biden, on voit bien que ces mandats d'arrêt sont susceptibles d'avoir des effets absolument considérables. Ce qui est certain, ce qu'on peut dire a minima, c'est que ça ne renforce pas la légitimité de Netanyahu, ça le vulnérabilise. Il était déjà vulnérabilisé, y compris en Israël, y compris au sein de sa majorité avec des déclarations qui exprimaient de plus en plus de réserves sur les choix militaires faits et sur cette logique de fuite en avant. Est-ce qui va aller de plus en plus dans une politique de la terre brûlée en réaction à ces mandats d’arrêts ? C’est une hypothèse, malheureusement, qu'on ne peut pas exclure. Mais en tous cas, ça ne consolide pas la légitimité de la politique de Netanyahu. C'est impossible de dire ça. »

Les Israéliens, qu’ils soient pour ou contre leur Premier ministre, semblent cette fois-ci sur la même ligne que lui

Tomer, 24 ans, n’est pas un grand fan de Benyamin Netanyahu. Et pourtant, il juge inacceptable l’annonce du procureur de la CPI. « Cela met vraiment beaucoup d’Israéliens en colère. Pour nous, c'est une décision hypocrite. De base, en tant qu’Israéliens, nous n’avons pas une haute estime des institutions internationales et nous ne leur faisons pas confiance. Et ça se reflète donc sur notre opinion », explique-t-il.

Amit, 31 ans, est une fervente opposante de Benyamin Netanyahu. Elle pense que le Premier ministre mérite de finir derrière les barreaux. Pas à cause des Gazaouis, mais pour avoir abandonné les otages israéliens. « Il n’agit que dans son propre intérêt. Ce qui arrive à Gaza en ce moment est affreux, mais pour moi ce n’est pas un crime de guerre. Bien sûr, ça reste une guerre et de mauvaises choses ont été commises. De plus, Netanyahu refuse de penser au jour d’après… Ah bah le voilà justement… », termine-t-elle alors qu'un long convoi de véhicules blindés défile au même moment. Le Premier ministre israélien passe sous bonne escorte.

Benyamin Netanyahu accuse le procureur de la CPI « d’antisémitisme », pour avoir demandé un mandat d’arrêt contre lui et son ministre de la Défense.

rfi

 

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