En Inde, le parti nationaliste hindou de Narendra Modi, le BJP, pourrait régner pour cinq ans de plus après les élections à venir en juin. On fait souvent état d’un climat d'oppression et d’hostilité à l’égard des musulmans depuis l’élection de Narendra Modi. Qu’en est-il pour les chrétiens ? 

Le nationalisme hindou considère que le christianisme et l’islam sont des religions étrangères à l’Inde, et donc que les chrétiens et les musulmans sont soit des envahisseurs, soit des hindous qui ont été détournés de leur foi originelle. Cependant, ce sont d’abord les musulmans qui font les frais de cette idéologie. D’abord, car les chrétiens ne sont qu’un peu plus de 2% en Inde contre 16% pour les musulmans, soit 35 millions d’un côté et 200 millions de l’autre. D’autre part, parce que les royaumes musulmans et hindous se sont livrés pendant des siècles à de sanglantes guerres en Inde, alors que le christianisme s’est plutôt implanté par les missionnaires.

D’ailleurs, les écoles chrétiennes forment toujours l’élite du pays. Donc les chrétiens ne sont pas visés systématiquement comme peuvent l'être les musulmans. Par exemple, la loi sur la citoyenneté CAA récemment proclamée donne la nationalité indienne à certains réfugiés à condition qu’ils ne soient pas musulmans. Lorsque des villes sont renommées par les nationalistes hindous, ce sont le plus souvent des noms musulmans, comme Allahabad, qui est devenue Prayagraj. Le BJP est ainsi capable de courtiser certains prêtres dans des États où le vote chrétien est important comme Goa ou le Kerala.

Situation dégradée

Pour autant, plusieurs indicateurs montrent que la situation s’est dégradée pour les chrétiens en Inde depuis l’accession au pouvoir de Narendra Modi en 2014, parce que pour les extrémistes hindous, ils restent perçus comme des intrus et c’est pour cela qu’on voit se multiplier les violences à l'égard des chrétiens. C’est particulièrement vrai dans les états du nord et du centre de l’Inde comme l’Uttar Pradesh, le Madhya Pradesh ou le Chhattisgarh. Selon le Forum chrétien uni (UCF), l'organisation de surveillance des droits humains basée à New Delhi, 731 attaques ont été enregistrées contre des Indiens chrétiens en 2023. C’est au moins dix fois plus qu’avant que les nationalistes hindous s’emparent du pouvoir.

Le plus souvent, ces attaques sont orchestrées par des fondamentalistes hindous qui accusent les chrétiens de conversions forcées ou de prosélytisme. Cela peut aller jusqu'à des passages à tabac ou le saccage de lieux saints sans que la police locale réagisse sérieusement. La hausse est aussi nourrie par le conflit en cours dans l'État du Manipur, qui voit deux ethnies, les Meteis majoritaires et les Kukis, s’entretuer depuis des mois. Au moins 200 églises ont été brûlées, selon les autorités chrétiennes locales. Lors ce vendredi saint, plusieurs évêques se sont élevés contre « les forces des ténèbres » qui menacent les chrétiens en Inde. La veille, le ministre en chef BJP du Manipur avait voulu supprimer ce jour férié aux origines non hindoues. Il a depuis fait marche arrière devant l’outrage.

rfi

 

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